Les scrutins, soutiens spirituels aux catéchumènes
Les catéchumènes vivent les dernières semaines qui les séparent de la Vigile Pascale de manière plus intense. Le baptême qu’ils s’apprêtent à recevoir est pour eux l’aboutissement d’un désir qui date souvent de plusieurs années. Or se profile, au moment du Carême, une vie chrétienne « ordinaire » qu’ils redoutent un peu, comme ils redoutent le vide qu’ils ressentiront sans doute après Pâques.
À la joie de voir approcher la date de leur baptême peut s’ajouter aussi, chez certains, une interrogation sur la « qualité » de leur conversion, avec la crainte de ne pas être à la hauteur de tout ce qu’ils ont reçu. Ils ressentent souvent une tension intérieure, conscients des résistances que la suite du Christ génère en eux. C’est un véritable combat spirituel, même s’il n’est pas exprimé et toujours reconnu comme tel. De plus, beaucoup ne peuvent pas partager leurs appréhensions avec des proches, pas toujours favorables.
Une initiative par la liturgie à la dimension pénitentielle de la vie chrétienne
Les scrutins permettent de se placer en vérité devant le Christ. Il s’agit de se laisser « fouiller » par la parole de Dieu et par le Christ. La prière est ainsi une prière d’exorcisme. « Exorcisme », un mot qui n’a plus bonne presse. C’est en fait un rite très ancien « destiné à délivrer la personne de l’influence du Mauvais et à l’ouvrir à la grâce du Christ ». Les futurs baptisés comprennent de manière presque intuitive ce que représente la figure énigmatique du mal. Les prières d’exorcisme les rejoignent davantage qu’on ne penserait spontanément car, si elles n’hésitent pas à les mettre en face du mal, c’est pour les encourager à faire appel à Dieu qui veut les en libérer.
Les scrutins mettent en œuvre une liturgie simple et dépouillée :
* d’abord une prière silencieuse de l’assemblée, et des catéchumènes qui se sont inclinés ou agenouillés.
* Suit une prière litanique, les parrains et marraines posant la main droite sur l’épaule de leurs filleuls.
* Puis une prière d’exorcisme, lors de laquelle les gestes du célébrant sont signifiants : mains jointes, pendant la prière à Dieu, puis imposition de la main en silence sur chaque catéchumène, puis les mains étendues sur tous les catéchumènes pendant la prière d’exorcisme adressée à Jésus avec l’invocation de l’Esprit Saint.
La force de ces gestes et de cette prière au Dieu trinitaire, leur fait prendre conscience que, malgré toutes les inquiétudes et leurs appréhensions, avancer sera toujours possible, car ce n’est pas à la force du poignet que l’on devient chrétien, mais par la force de l’Esprit Saint.
Notons enfin que le rite du renvoi trouve une vraie pertinence après un rite de scrutin. En effet, venant de vivre une étape liturgique essentielle dont les gestes et les paroles les ont fortement marqués et touchés, les catéchumènes ont besoin que ce qui vient de se passer puisse se déployer, s’exprimer.
Trois rencontres « salutaires »
Le RICA propose de célébrer trois scrutins les troisième, quatrième et cinquième dimanches de Carême, articulés sur les trois évangiles correspondants de l’année A : la rencontre salutaire de Jésus avec une Samaritaine (Jn 4, 1-42), la guérison d’un aveugle-né (Jn 9, 1-41), le retour à la vie de Lazare (Jn 11, 1-44).
Ces trois textes d’Évangile révèlent aux catéchumènes leur propre chemin de foi, comme un chemin de vérité, un chemin de parole et un chemin de liberté.
Le premier scrutin signifie qu’ils ne peuvent accéder à l’Eau vive du baptême et accueillir le regard d’amour du Christ sans faire la vérité sur eux-mêmes. Le second signifie un chemin de liberté, car Jésus est porteur d’une Parole de vie qui guérit l’aveugle-né et lui ouvre les yeux sur la vraie vie. Le troisième signifie qu’être baptisé c’est se laisser tout entier envahir. Lazare était tout entier entravé dans la mort. la Parole de Dieu l’invite à se laisser délier pour une nouvelle vie, regagnée : « Laissez-le aller ». Le but est donc de se laisser ressusciter par la parole de Dieu, et pour cela, de se dépouiller des bandelettes qui entravent la liberté.
Les scrutins sont donc pour les appelés un moment privilégié de rencontre avec le Christ, un moment unique d’initiation chrétienne.
La force qu’ils puisent, grâce à ces trois passages d’Évangile et aux rites vécus en communauté, les aide, n’en doutons pas, à oser devenir chrétiens
(Reprise d’une Conférence de Roland Lacroix, professeur à l’Institut Catholique de Paris)
“On veut nous faire croire que la communication, c’est l’instantanéité.
Nous savons que les vraies relations exigent du temps et de la profondeur…”
Bernard Bidaut